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Première non-application des protections croissantes après la décision de la Cour Constitutionnelle italienne

Catégories: DLP Insights, Case Law

29 Oct 2018

Par communiqué du 26 septembre 2018, la Cour Constitutionnelle a annoncé avoir déclaré constitutionnellement illégitime l’art. 3 du décret législatif 23/15 (« Dispositions en matière de contrat de travail à durée indéterminée à protection croissante, en application de la loi n° 183 du 10 décembre 2014 ») dans la partie – non modifiée par le décret législatif 87/2018 (le Décret Dignité) converti en loi 96/2018 – qui détermine de manière fixe l’indemnité à verser au travailleur licencié sans motif justifié, car, on lit toujours dans le communiqué, le fait de prévoir une indemnité croissante en raison de la seule ancienneté de service du travailleur « est contraire aux principes de proportionnalité et d’égalité et est en contraste avec le droit et la protection du travail établis par les articles 4 et 35 de la Constitution ». Suite à la publication du jugement, le Tribunal de Bari, par ordonnance n° 7016 du 11 octobre 2018 (commentée ci-après), a décidé de ne pas appliquer le critère de calcul déclaré inconstitutionnel.
La décision du Juge du Travail
Le Juge du Travail de Bari, constatant l’illégitimité du licenciement sommé à un travailleur sous le régime du Jobs Act a déclaré, à l’issue de la procédure de licenciement collectif, la résiliation du contrat de travail, condamnant l’ancien employeur à une indemnisation de 12 mois de salaire – calculée sur le dernier salaire de référence pour le calcul des indemnités de départ – au lieu des 4 mois de salaire auquel il aurait eu droit, ayant une ancienneté de service d’un an et demi.
En parvenant à une telle décision, le Juge a notamment fait ressortir que :
– selon l’art. 10 du décret législatif 23/2015 « (…) En cas de violation des procédures mentionnées à l’article 4, 12e alinéa, ou des critères de choix visés à l’article 5, 1er alinéa, de la loi n° 223/1991, le régime faisant l’objet de l’article 3, 1er alinéa, s’applique » ;
– l’art. 3, 1er alinéa, du décret législatif 23/2015 énonce ce qui suit : « Sans préjuger des dispositions du 2e alinéa, dans les cas où il s’avèrerait que les critères du licenciement pour motif objectif justifié ou pour motif subjectif justifié ou pour faute ne sont pas remplis, le juge déclare résilié le contrat de travail à la date de licenciement et condamne l’employeur à payer une indemnité (sans cotisations sociales) d’un montant égal à deux mois du dernier salaire de référence pour le calcul des indemnités de départ pour chaque année de service, d’un montant minimum de quatre et maximum de vingt-quatre mois » ;
– pour les travailleurs assujettis au régime de la Loi Fornero, le non-respect des procédures en question active la protection « compensatoire forte » visée à l’art. 18, 7e alinéa, troisième point, de la Loi italienne 300/1970 qui, à son tour, renvoie au 5e alinéa du même article. Sur ce point (i), le 7e alinéa dispose que : « dans les autres hypothèses où il constate que les critères du motif justifié susmentionné ne sont pas remplis, le juge doit appliquer les normes énoncées au cinquième alinéa. Dans ce dernier cas, le juge, pour le calcul de l’indemnité minimum et celle maximum prévues, tient compte non seulement des critères énoncés au cinquième alinéa mais aussi des initiatives prises par le travailleur pour la recherche d’un nouvel emploi et du comportement des parties dans le cadre de la procédure visée à l’article 7 de la loi n° 604 du 15 Juillet 1966 et modifications ultérieures ». De plus, (ii) le 5e alinéa établit que « Le juge, dans les autres hypothèses où il constate que les critères de motif subjectif justifié ou de faute allégués par l’employeur ne sont pas remplis, déclare résilié le contrat de travail avec effet à compter de la date de licenciement et condamne l’employeur au paiement d’une indemnité compensatoire globale s’élevant à un minimum de douze et un maximum de vingt-quatre mois du dernier salaire global de fait, en fonction de l’ancienneté du travailleur et tenant compte du nombre d’employés salariés, des dimensions de l’activité économique, du comportement et des conditions des parties, avec une obligation de motivation spécifique à cet égard »). Cette protection a en effet été invoquée par le travailleur dans les conclusions de son recours ;
– comme le travailleur avait été embauché sous le régime du Jobs Act, la discipline édictée par le décret législatif italien 23/2015 s’applique. Toutefois, la nouvelle discipline du Décret Digité, qui a modifié l’art. 3, 1er alinéa, du décret législatif italien 23/2015, augmentant l’indemnité compensatoire (à présent comprise entre six et trente-six mois) n’est pas applicable, parce que le licenciement contesté a été ordonné à une époque antérieure à son entrée en vigueur.
De l’avis du Juge, donc, le travailleur aurait pu avoir droit uniquement au versement de l’indemnité minimum de 4 mois de son dernier salaire de référence pour le calcul des indemnités de départ. Malgré cela, toujours selon le Juge, il faut tenir compte de la décision de la Cour Constitutionnelle.
Compte tenu de tout ce qui vient d’être énoncé ci-dessus, le Juge conclut ainsi « bien que conscient que les normes déclarées inconstitutionnelles ne peuvent trouver application au lendemain de la publication de la décision (art. 30 3e alinéa de la loi 87/1953, conformément à l’art. 136 1er alinéa de la Constitution), et que cette publication n’a pas encore eu lieu, il est estimé nécessaire d’interpréter de manière conforme aux dispositions de la Constitution l’art. 3, 1er alinéa, encore en vigueur (probablement pendant quelques jours seulement), fixant l’indemnité revenant au travailleur injustement licencié à un minimum de 4 et un maximum de 24 mois, sur la base des critères déjà énoncés par l’art. 18, 5e alinéa, du Statut des Travailleurs, à son tour cité à l’art. 18, 7e alinéa, à savoir « en rapport avec l’ancienneté du travailleur et compte tenu du nombre de salariés, des dimensions de l’activité économique, du comportement et des conditions des parties ».
En fixant à 12 mois l’indemnité compensatoire due au travailleur, le Juge a considéré, au-delà du critère de son ancienneté de service, des critères comme (i) la considérable gravité de l’omission de procédure (dans le cadre d’un licenciement collectif), (ii) le faible nombre de salariés employés par la société et (iii) les dimensions de son activité économique.

 

 

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