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La sanction de mise à pied disciplinaire est illégitime si les faits justifient le licenciement (Diritto 24 de Il Sole 24 Ore, 29 mars 2019 – Alberto De Luca, Gabriele Scafati)

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29 Mar 2019

Par sa récente sentence n° 285 du 1er février 2019, le Tribunal de Milan a statué sur la légitimité du comportement d’un employeur qui demande à un candidat de présenter un « extrait des procédures pénales en cours » (certificato dei carichi pendenti) le concernant et indique si ce dernier est tenu d’honorer la demande. L’affaire naît de la procédure disciplinaire engagée à l’encontre d’un travailleur auquel il a été reproché de ne pas avoir indiqué, lors de son entretien d’embauche, qu’il avait été condamné pénalement, deux ans auparavant, à une peine de 4 ans et 4 mois de réclusion, pour des délits informatiques. La sentence reporte l’intégralité de la lettre de l’avertissement disciplinaire remise au travailleur, où étaient décrits en détail les faits imputés, comme, notamment, le fait d’utiliser les données abusivement dérobées à une femme, travaillant par ailleurs pour le même employeur, dans le but de les utiliser ensuite pour harceler sa collègue. En particulier, il était contesté au travailleur, d’une part, d’avoir adopté une conduite (celle du harcèlement) portant préjuice à la santé et à la sécurité sur le lieu de travail, au détriment d’une collègue et, d’autre part, d’avoir dissimulé les faits (et l’existence d’une condamnation pénale d’une telle importance), lors de son embauche. Suite à la procédure, le travailleur avait été sanctionné par une mise à pied, et par conséquent une suspension de salaire, de 10 jours. Le Tribunal de Milan, appelé à se prononcer sur le recours du travailleur, a annulé la mesure de sanction. Sur le premier point, de l’avis du soussigné, le juge s’est prononcé de manière discutable sur le fait que la mesure de suspension n’était pas adéquate pour sanctionner une atteinte à la santé et à la sécurité sur le lieu de travail, qui aurait plutôt dû être sanctionné par une mesure d’expulsion. En effet, le juge a fait valoir que, compte tenu de la gravité des faits contestés, « la nature [NDLR, conservatoire] de la sanction disciplinaire infligée (…) apparaît contradictoire et antithétique par rapport aux prémisses de l’avertissement disciplinaire », ce qui conduirait à la conclusion que la seule sanction légitime aurait pu être celle du licenciement. Quant à la violation présumée de la prétendue obligation de produire un extrait des procédures pénales en cours (certificato dei carichi pendenti), le juge milanais a exclu, en outre, que le travailleur était tenu à un devoir d’information générique, lors de son embauche, concernant l’existence de précédents de natue pénale à sa charge, en dehors des hypothèses où cela fait l’objet d’une demande spécifique de la part de l’employeur, pour la fonction publique ou pour des emplois bien précis. En conclusion, il est intéressant de noter que la sentence en question a réaffirmé – et précisé en ce qui concerne la phase de sélection du personnel – le principe selon lequel il n’est licite que dans certaines circonstances de demander au travailleur de présenter un « relevé des sanctions pénales » ou « casier judiciaire », faisant état des condamnations pénales prononcées (également conformément aux dispositions de l’art. 8 de la Loi italienne dite « Statuto dei Lavoratori ») ; tout en rappelant qu’il est encore absolument interdit de demander un « extrait des procédures pénales en cours » (certificato dei carichi pendenti), qui porterait atteinte à la présomption d’innocence de chaque citoyen tant qu’une condamnation définitive n’a pas été prononcée (arrêt n° 19012 du 17 juillet 2018 de la cour de cassation).

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