La gestion correcte des contrôles patronaux : limites légales et bonnes pratiques
La bonne gestion des contrôles que l’employeur peut mettre en œuvre est un sujet toujours sensible pour les entreprises, rendu aujourd’hui encore plus important par la diffusion de technologies et d’outils de plus en plus avancés. Des décisions récentes de la Cour de cassation ont réaffirmé certains principes fondamentaux concernant la légitimité des vérifications patronales, que ce soit via des agences d’investigation ou par l’accès aux outils informatiques utilisés par les salariés. Il est donc essentiel pour les employeurs de savoir comment équilibrer la protection des intérêts de l’entreprise avec le respect de la vie privée des employés.
Le rôle des agences d’investigation
Une ordonnance récente de la Cour de cassation (Chambre sociale, 12 février 2025, n° 3607) a confirmé la légitimité du licenciement pour juste cause d’un salarié qui, après avoir pointé son badge, s’était éloigné du lieu de travail avec un véhicule de l’entreprise pour effectuer des activités personnelles, donc non liées à l’exécution de ses fonctions. L’élément clé de cette affaire réside dans le contrôle effectué par l’entreprise avec l’aide d’un détective privé qui, bien qu’ayant suivi les déplacements du salarié dans des lieux publics, n’a pas violé sa vie privée. En effet, selon la décision, le contrôle ne portait pas sur un éventuel manquement à la prestation de travail, mais sur la vérification d’une conduite frauduleuse du salarié.
Les entreprises font souvent appel aux agences d’investigation pour vérifier des comportements potentiellement illicites des salariés, comme l’absentéisme injustifié ou l’usage abusif des congés. Cependant, les modalités d’exécution de ces contrôles sont encadrées par des limites précises, légales et autres. Comme l’a plusieurs fois affirmé la jurisprudence, les contrôles sont légitimes uniquement s’ils visent à vérifier des comportements du salarié qui pourraient constituer des fraudes et donc être potentiellement préjudiciables à l’employeur. Ces contrôles ne peuvent en aucun cas interférer avec ou concerner directement l’activité de travail elle-même.

Un exemple typique concerne les contrôles portant sur l’usage correct des congés prévus par la Loi 104/1992, éventuellement accordés aux salariés pour l’assistance aux membres de leur famille en situation de handicap. En cas de soupçons fondés d’abus, l’entreprise peut légitimement mandater une agence d’investigation pour l’aider à vérifier un éventuel comportement illicite, mais les enquêtes doivent être ciblées, proportionnées et limitées à la vérification de l’abus suspecté. Il est donc essentiel de les utiliser de manière raisonnée et justifiée, en évitant toute forme de surveillance intrusive ou généralisée.
Contrôles des dispositifs professionnels
Dans le cadre des contrôles défensifs, l’employeur pourrait avoir besoin d’accéder aux dispositifs professionnels et outils de travail fournis aux salariés, tels que, par exemple, ordinateurs portables, téléphones et boîtes mail professionnelles. À ce sujet, il convient de mentionner la plus récente décision, en date, de la Cour de cassation qui s’est prononcée sur la légitimité des contrôles patronaux effectués notamment par l’accès à la boîte mail professionnelle.
La Cour de cassation, avec l’ordonnance n° 807 du 13 janvier 2025, a rappelé que l’employeur ne peut accéder aux mails professionnels d’un salarié qu’en cas de soupçon fondé d’infraction. Le contrôle doit donc être justifié par un soupçon concret d’illégalité et ne peut être mené de manière arbitraire ou rétroactive.
Cette question appelle une réflexion importante sur les contrôles patronaux dans un contexte où les nouvelles technologies ont largement élargi les possibilités de surveillance. Il est donc essentiel de définir clairement les limites à respecter afin que les actions entreprises et les données éventuellement recueillies soient considérées comme légitimes et conformes au cadre juridique actuel. En cas de non-respect de ces limites, les informations recueillies pouvant confirmer la commission d’infractions deviennent inutilisables.
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